Choix et exploitation des critères de tenue en calcul de structure - RDM

Un travail de calculateur

Introduction


Le calcul de structure est une aide à la conception qui consiste à anticiper le comportement des structures soumises à des sollicitations mécaniques extérieures.
Cela permet d’éliminer les risques de défaillances et donc d’assurer la bonne tenue de ces structures au regard des exigences du cahier des charges.

Il existe différents types de tenue et, selon les sollicitations appliquées aux structures, on parle de critère de tenue.
Chaque critère de tenue est uniquement basé sur les caractéristiques intrinsèques des matériaux.
Seules ces caractéristiques matériaux peuvent permettre de conclure quant à la tenue ou la non tenue de la structure au regard des efforts subis.

 

Les 4 grandes familles de critères de tenue sont :

  1. Statique
  2. Dynamique
  3. Fatigue
  4. Flambement

 

1. La tenue statique


La tenue statique fait référence à la capacité d'une structure à supporter des charges constantes (ou quasi-constantes).

Le critère de tenue statique est basé sur :

  1. la contrainte (résistance) limite élastique des matériaux (cf lien), Re (terme général) ou Rp0.2 voire Rp0.1 : pour un effort ayant engendré une contrainte < Re, la déformation induite de la structure est 100% réversible après annulation de l’effort.

  2. la contrainte limite à rupture des matériaux, Rm : pour un effort ayant engendré une contrainte entre les valeurs de Re et de Rm, la structure restera déformée après annulation de l’effort, on parle de déformation plastique.
    Au-delà de Rm, l’effort engendrera la rupture de la structure.

On parlera donc de :

  1. Critère Re ou Rp0.2 : la structure ne devra pas subir de déformation plastique.
  2. Critère Rm : la structure ne devra pas rompre mais pourra rester déformée après l’arrêt de la sollicitation en effort.

Le cas échéant, ce critère de tenue statique peut faire partie intégrante du cahier des charges calcul afin que le calculateur puisse conclure dans son rapport sur la tenue ou la non tenue de la structure au regard du critère.
Les critères de tenue statique Re, Rp0.2 ou Rm sont donc couramment utilisés dans la conception de structures où les charges sont généralement constantes ou varient lentement.

Le module d’Young E, la Re ou Rp0.2, la Rm et le A% constituent les caractéristiques mécaniques des matériaux.

 E, Re, Rm sont exprimés en N/mm² ou MPa (mégapascal).

 

Essai didactique à reproduire aisément au bureau : prenez un trombone, dépliez-le pour le rendre à peu près rectiligne puis :

  1. pliez-le un peu, il reviendra à sa forme initiale : vous n'avez pas dépassé Re.
  2. pliez-le plus fort, il reste plié (à concurrence de la déformation totale moins la déformation élastique) : vous avez dépassé Re et le matériau a plastifié à concurrence de la déformation plastique.
    Déformation totale = déformation élastique + déformation plastique.
  3. pliez-le et dépliez-le un peu et plusieurs fois : il revient à sa forme initiale, vous pourriez réaliser cela un grand nombre de fois, c'est le potentiel de tenue en fatigue.
  4. pliez-le et dépliez-le fortement : au bout d'environ une dizaine de cycles pliage-dépliage, il casse : pas de potentiel de tenue en fatigue.

 

2. La tenue dynamique


La tenue dynamique fait référence à la capacité d'une structure à supporter des charges de courtes durées : chute, impact, vibratoire, …

Le critère de tenue dynamique est basé sur les mêmes types de contraintes qu’en statique, à cela près qu’en dynamique, le module d’Young et les contraintes Rp0.2 et Rm dépendent de la vitesse de la sollicitation. Il faudra donc réaliser les essais de Split Hopkinson Kolsky (cf lien) pour obtenir les caractéristiques mécaniques.
Cf exemple.

 

3. La tenue en fatigue


La fatigue est un phénomène au cours duquel une structure subit une défaillance après un grand nombre de cycles de charge et de décharge : il s’agit d’un cumul d’endommagement qui s’opère de manière quasi invisible mais qui - par la coalescence de criques - peut engendrer une rupture.
Même si les efforts appliqués sont inférieurs à la limite élastique du matériau, le cumul d’endommagement encaissé par la structure au cours d’un grand nombre de cycles pourra engendrer sa rupture : on parle de rupture en fatigue.
La tenue en fatigue est donc la capacité d'une structure à résister à ces charges cycliques sans se rompre.
Les courbes permettant de retrouver ces valeurs en fonction des nuances de matériaux sont appelées courbes de Wöhler, cf lien.
Les critères de fatigue sont essentiels dans la conception de composants soumis à des charges répétées ou vibratoires, tels que les arbres tournants de moteurs (tout type de moteur), de transmission, et plus généralement toutes les structures subissant des cycles d’efforts répétés.
À noter qu’une structure soumise à des contraintes > (Re ou Rp0.2) ne présentera aucun potentiel de tenue en fatigue.

 

4. La tenue au flambement


Le flambement est un mode de défaillance qui survient en compression.
Il s’agit d’un phénomène d’instabilité (moment de flexion parasite) qui peut entraîner l’effondrement soudain de la structure.
La tenue au flambement est donc la capacité d'une structure à résister à ce risque de défaillance.
Plus une structure est élancée et plus sa sensibilité au flambement est importante.
Le critère est la charge critique de flambage donné par la formule d’Euler : F = ∏².E.I/l²

  • F est l'effort
  • E est le module d'Young du matériau
  • I est le moment quadratique de la poutre
  • l est la longueur de flambement de la poutre.

On parle de :

  • Charge critique d'Euler : la charge à laquelle une structure élancée soumise à la compression commence à flamber.
  • Longueur de flambement : longueur de la structure élancée soumise à la compression.
  • Coefficient de flambement : facteur de sécurité par rapport à la charge qui assure le non flambement.

Application :
Le critère de flambement est très important pour les colonnes, les poteaux, les membrures comprimées dans les treillis et les éléments de structures de grande longueur-hauteur, en somme toutes les structures élancées soumises à de la compression.
Le calculateur devra donc bien anticiper ce risque.

 

À noter qu’un chargement en effort d’une structure peut générer différents types de contraintes : compression, traction, cisaillement, torsion, flexion, et ce plus ou moins endommageantes.
Le travail du calculateur devra consister à bien comprendre comment sera sollicitée sa structure afin de conclure et de proposer des préconisations d’améliorations.
Par exemple, en règle générale, une sollicitation en compression est moins endommageante qu’une sollicitation en traction, elle-même moins endommageante que du cisaillement ou de la torsion.
Autre exemple, pour une structure en acier de construction qui ne tient pas en fatigue, rien ne sert de choisir un matériau de meilleures caractéristiques mécaniques, en effet les courbes en fatigue des S235JR à S700 se rejoignent asymptotiquement : il faut impérativmement modifier les inerties des piéces...
De plus, une structure va subir une combinaison de sollicitations en traction, compression, cisaillement, et afin de faciliter l’exploitation des contraintes, nous utilisons 2 critères isotropes - Von Mises et Tresca - qui vont combiner les taux de contraintes en traction, compression et cisaillement pour donner ce que l’on appelle ''une contrainte équivalente'' qui sera comparée à Re, Rp0.2, Rm : cf lien.

 

Conclusion


Le choix des critères de tenue en calcul de structure dépend de la nature des charges appliquées et des conditions opérationnelles.
En combinant une compréhension approfondie des différents types de tenue – statique, dynamique, fatigue, flambement – les calculateurs peuvent concevoir des structures fiables et le respect de ces critères garantit la sécurité et la performance des structures dans leur environnement d'utilisation.

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